Tout faire pour faire tout ! Des pieds pour danser et des mains pour jouer. Ce solo est un petit moment de suspension et de liberté où choisir n’est pas obligatoire. Entre écoute et regard, il invite les plus jeunes à découvrir toute la force de l’œuvre d’art vivante et le métier d’interprète à travers deux langages, ceux de la danse et de la musique. Sur le plateau, tapis blanc, un piano (quart-de-queue ou demi-queue) comme unique décor.
Ici il est question de dualité au service-même de la gémellité artistique incarnée par l’artiste en scène. Avec cette performance, toute opposition, tout paradoxe se trouvent transcendés dans un mouvement complémentaire à la fois musical et chorégraphique.
Mon rôle de chorégraphe est aussi de mettre en avant et de révéler des danseurs. C’est pour cela que j’ai l’envie de composer avec l’interprète Pedro Hurtado, que j’ai découvert en 2010, à Quito, en Équateur. Ce danseur est aujourd’hui un interprète de ma compagnie ngc25. A ma demande, il y a quatre ans, il s’est installé en France et danse, depuis, dans les pièces du répertoire : « Roméo & Juliette », « Le bal à Boby » et, dernièrement, « Salam ». Repéré, apprécié par les professionnels et le public, Pedro Hurtado est complétement intégré au sein de ma compagnie et dans les actions culturelles liées à la diffusion. Pedro est un remarquable danseur et aujourd’hui je veux explorer tous ses potentiels chorégraphiques mais aussi musicaux. En effet, Pedro a commencé en Équateur son métier d’interprète comme concertiste et non comme danseur. Il joue du piano comme il danse. Aussi, ce solo s’appuie sur ses qualités de danseur-musicien permettant de redécouvrir des œuvres classiques accessibles aux plus jeunes, de rentrer dans l’imaginaire de cet artiste et de partager ce monologue gestuel et musical comme si nous rentrions un peu chez lui.
C’est avec ces deux « outils » que je souhaite porter mon travail chorégraphique : la danse et le piano. Comment le danseur approche-t-il la musique ? Comment la musique devient-elle une danse ? Comment l’interprète navigue-t-il entre ces deux moyens d’expressions ? Est-ce le même quand il joue et quand il danse ? Peut-il faire les deux ? Musicien ou danseur ? Danseur-musicien ? Comment les notes nourrissent-elles le mouvement ? La danse peut-elle se détacher de la musique ? Pourquoi ? Comment le danseur oscille-t-il entre silence et mélodie ? L’harmonie, qu’en est-il pour Pedro ? Entre équilibre et déséquilibre comment cet artiste se maintient sur le fil sans tomber d’un côté ou de l’autre, sans choisir entre deux passions, deux vies ?
C’est à travers la notion du double et de celle du contraste que ce solo se construit. D’une dualité qui s’oppose à une complémentarité harmonieuse, le temps du spectacle s’écoule dans une dialectique qui embrasse tous les paradoxes qui font la beauté d’une œuvre vivante. Mouvements rapides, lents, accélérations et ralentis, silences, arrêts, reprises…toutes ces dynamiques sont celles partagées à la fois par la danse et la musique. Plus similaires que différentes, aussi capricieuses et séduisantes l’une que l’autre, c’est à travers leur pouvoir et leur beauté que je souhaite éveiller les sens et la curiosité de l’enfant, initier un premier voyage intérieur et sensible pour mieux se connaître. Se rencontrer soi-même pour mieux s’ouvrir à l’autre.
Hervé Maigret